Alors d’après vous, pourquoi n’ose-t-on jamais dire « noir », « blanc », « juif », ou « musulman » ?
Parce qu’on confond les noms et les adjectifs ! C’est le principe même de l’essentialisation. Si l’on n’ose pas dire noir, c’est parce qu’on y met toutes les choses qui font qu’on pense qu’un Noir est un Noir. Lorsque j’ai sorti mon précédent livre, Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin, j’ai rencontré plein de journalistes blancs qui, voulant que je comprenne qu’ils n’étaient pas racistes, ne voulaient pas dire que j’étais noire… Et dans les conférences, il y avait des gens noirs qui me disaient que je ne parlais pas comme les Noirs… Bref, on se comporte comme si chacun devait parler depuis l’endroit qu’on lui a assigné.
Entre Michelle Obama et une migrante érythréenne, je ne sais pas ce qu’est une femme noire !
Tout le monde céderait, consciemment ou pas, à la tentation de l’assignation ?