Tania de Montaigne : « Il faut pouvoir dire noir, jaune, juif »

Si n’importe qui se fait insulter ou frapper pour ce qu’il est, le sujet, c’est le racisme. Si vous décidez de combattre le racisme, mais de n’intervenir que pour des gens qui vous ressemblent exactement, l’objet du combat n’est plus le racisme, mais l’identité. Et que faire lorsque ceux que je défends sont mis en cause dans des actes répréhensibles ? Se taire pour protéger le groupe ? Ce n’est pas sérieux. On confond la question des identités et celle de l’antiracisme. Ces groupes-là viennent chercher une culpabilité, ce qui leur permet de sanctuariser les combats en interdisant à d’autres d’entrer dans le sujet. Il y a dans cette manière de mener les combats l’idée d’une singularité à préserver, une singularité qui dispenserait de faire corps avec le reste de la société. Mais cette idée que l’on puisse être des individus très particuliers travaille avec le même dictionnaire que le racisme, l’antisémitisme ou l’esclavagisme ! Pour que quelque chose bouge, il faut que ce soit le sujet de tout le monde.