L’histoire insoupçonnée de l’érotisme en terre d’Islam

Telquel est un hebdomadaire marocain généraliste — économie, politique, société et culture- d’expression française. Sa ligne éditoriale est souvent critique envers le gouvernement marocain et progressiste. En dehors du Maroc, il est aussi diffusé en France.

« Dans leur langue, il n’est pas louable qu’un homme exprime sa passion pour un jeune homme. Ils réprouvent fortement ce genre d’expression. C’est pour cela, quand ils veulent traduire nos livres, qu’ils remplacent « j’aime un jeune homme » par « j’aime une jeunefemme » ou par « j’aime une personne » pour ne pas être dans l’embarras. Ecrire sur ces choses-là est une pure perversion pour eux. » L’auteur de ces lignes n’est pas un écrivain européen ou un journaliste américain déplorant le sort réservé à la littérature gay dans les zones tribales afghanes, mais un voyageur égyptien décrivant les mœurs du peuple… français au 19ème siècle. Dans cet extrait de ses souvenirs de voyage à Paris, le cheikh Rifaa Tahtawi explique comment les écrivains français étaient gênés et embarrassés à l’idée de traduire en français des poèmes et des contes arabes célébrant
la beauté masculine ou évoquant des amours homosexuelles. Eh oui. Les traducteurs européens déployaient alors des trésors d’imagination, entre ruses et jeux de mots, pour ne pas choquer leurs lecteurs avec cette littérature libertine et « étrangère » aux mœurs des européens à l’époque.