Au Maroc, l’espace public reste un enfer pour les femmes. Entretien avec la sociologue Safaa Monqid

Pour lutter contre les violences faites aux femmes, « il faut commencer dès l’enfance à travers une éducation non sexiste et des modes de socialisation égalitaires entre les deux sexes, surtout en ce qui concerne l’accès à l’espace public », dit à Mediapart Safaa Monqid. Maîtresse de conférences à l’université de Paris III-Sorbonne nouvelle, Safaa Monqid travaille sur la condition féminine dans le monde arabe. Elle a notamment étudié la place des femmes dans l’espace public dans la capitale marocaine (Femmes dans la ville. Rabat : de la tradition à la modernité urbaine, Presses universitaires de Rennes).

Safaa Monqid © drSafaa Monqid © dr

Près de deux Marocaines sur trois sont victimes de violences, selon des chiffres officiels. Et les lieux publics sont les endroits où la violence physique à leur égard est la plus manifeste. Comment l’expliquez-vous ?Safaa Monqid : Les différents types de violences, que ce soit des remarques, des gestes déplacés, des actes d’agression verbale et/ou corporelle, traduisent les résistances masculines à l’appropriation des espaces publics par les femmes. Ce n’est pas étonnant lorsqu’on sait que les femmes n’ont pas de tradition de présence dans l’espace public à dominance masculine, même si leur présence n’y est plus marginale. Les hommes, en général, ont des comportements sexualisés : ils se comportent dans l’espace public comme s’ils avaient tous les droits et considèrent les femmes au-dehors comme une propriété publique.