Objet de toutes les relégations, les quartiers ont tendance à se couper du reste de la société. Retisser le lien par la mobilisation des habitants eux-mêmes, assurer l’interface et même la traduction avec les institutions, voici le pari fou des Voisins Malins.
article publié sur le site theconversation.com le 10 07 2018
La presse nous montre les quartiers difficiles comme des lieux d’incivilités et de trafics divers, mais ce sont surtout des lieux de solitude et de désarroi. Parlant peu le français, nombre d’habitants se sentent seuls face à la complexité administrative et ne peuvent guère faire valoir leurs droits. L’école où vont leurs enfants, les lieux culturels, et même le centre social leur paraît des univers étrangers, et quand le bureau de Poste est fermé, que les urgentistes ne viennent plus, le sentiment d’abandon s’installe.
Inventer des médiations nouvelles
Anne Charpy, après avoir travaillé pendant 15 ans en lien avec des quartiers populaires, a voulu lancer une initiative pour remédier à cette coupure.
« En 2008, le maire de Grigny, très impliqué dans sa ville de presque 30 000 habitants, n’a été réélu qu’avec à peine 2 000 voix, ce qui m’a profondément marqué. Pour les décideurs dont je faisais partie, il fallait que les services soucieux d’améliorer la situation et les habitants puissent se rencontrer. Les institutions n’étant plus le lieu adéquat, nombre d’associations étant à bout de souffle, il fallait inventer quelque chose qui parte des habitants. »
Alors directrice du GIP Grigny-Viry-Châtillon, elle et son équipe avaient trouvé une dizaine d’habitants parlant différentes langues qui avaient accepté de servir de traducteurs, par exemple, entre les instituteurs et les familles. Une centaine de familles avaient ainsi été remises en contact avec les écoles. Puis les traducteurs eurent l’idée de traduire les contes lus lors de soirées du centre social, les rendant accessibles à davantage de personnes.