Au xviiie siècle, la Révolution française a transformé les cimetières paroissiaux en cimetières communaux, ce qui n’était pas encore une déconfessionnalisation. Il faudra donc attendre les lois laïques de 1881 et 1884 pour que soit mis un terme à l’obligation pour les communes de séparer les défunts en fonction de leur croyance ou des circons- tances du décès – ce qui visait auparavant à mettre à part dans le dernier repos les « réprouvés », enfants mort-nés ou sans baptême, les voyageurs dont la religion ne pouvait être attestée, les suicidés, les duellistes non-repentis, les francs-maçons, les excommuniés, les usuriers, et jusqu’aux comédiens, comme ce fut le cas pour Molière…
Le coup de grâce de la domination des cultes sur la mort a été la loi du 28 décembre 1904 leur enlevant le monopole des pompes funèbres et leurs droits à l’intérieur des cime- tières au profit des communes.
En un mot, la République, en supprimant ces carrés confessionnels qui, dans un cimetière communal, devaient être à proportion au nombre d’habitants du culte considéré,
« partagé par des murs, haies ou fossés en autant de parties qu’il y a de cultes différents avec des entrées particulières pour chacun », se fixait comme objectif que les croyants ne soient plus amenés à conduire leurs défunts dans une sorte de « patrie confessionnelle ». Problème symbolique délicat que celui du lieu de sépulture où la mort semble cristal- liser pour l’éternité une appartenance collective cultuelle et non la seule adhésion à une foi individuelle et privée.
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