Mais de quelle manière les Ahmadis peuvent-ils se défendre ? Quels arguments peuvent être entendus ? Mon analyse du discours montre que deux schémas d’interprétation dominent : l’argument de la liberté religieuse pour les minorités, et le nationalisme. Tous deux sont des discours puissants en Indonésie. Ma thèse consiste à dire que les droits de l’homme et le nationalisme fonctionnent encore comme des cordes de sauvetage pour les ahmadis marginalisés, mais que la forte réduction du débat public à ces deux seuls schémas d’interprétation peut avoir à long terme de graves conséquences. Comme la politiste Elizabeth Shakman-Hurd le montre dans son dernier ouvrage sur les relations internationales, la réduction à un aspect dominant de l’identité exclut les possibilités d’alliances diversifiées : si les musulmans indonésiens ne voient pas en les ahmadis des coreligionnaires, leur droit d’exister dépend alors de l’acceptation par leurs concitoyens des Droits de l’Homme, ou de la force du sentiment national de ces derniers. Et enfin aussi, s’ils considèrent encore les ahmadis comme des humains. On sait exactement à quelle vitesse se développent les sociétés et à quelle vitesse les catégories marquées en tant que groupe peuvent être exclues de la communauté. De la tolérance fondée sur une ou quelques caractéristiques identitaires s’ensuit donc le danger que ces caractéristiques dans la société perdent en importance, ou que cette catégorie ne soit exclue du groupe auquel elle est sensée appartenir.
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19.09.2017