Un des exemples les plus emblématiques de ces foules haineuses est Justine Sacco. Le 20 décembre 2013, la trentenaire, attachée de presse pour IAC, un groupe qui gère plusieurs services web (Vimeo, OkCupid, etc.), tweete de l’aéroport à ses 170 followers : «Départ pour l’Afrique. Espère ne pas choper le sida. Je déconne. Je suis blanche !»Aucune réaction, pas de «j’aime», ni de retweet. Elle prend son avion, et c’est alors qu’elle est déconnectée que tout s’emballe. Un journaliste du site Gawker prend connaissance du tweet et le relaie à ses lecteurs. Le vol de Justine Sacco dure onze heures, largement le temps pour qu’Internet prenne feu. Quand elle atterrit, 100 000 messages l’accusant de racisme, la plupart d’une violence extrême, ont été postés, et, dans les dernières heures, le hashtag #HasJustineLandedYet («Justine a-t-elle atterri ?») se retrouve en tête des «tendances» de Twitter (avec, même, la participation d’un certain @realDonaldTrump). Arrivée au Cap, elle est licenciée par IAC et découvre, horrifiée, l’étendue des dégâts. Justine Sacco expliquera plus tard au journaliste Jon Ronson : «C’était un commentaire totalement affreux sur les statistiques disproportionnées du sida. Malheureusement, je ne suis pas un personnage de South Park, ni une comédienne, ce n’est donc pas à moi de commenter l’épidémie d’une manière aussi politiquement incorrecte sur une plateforme publique.»
0