Mais cette fachosphère protéiforme, si elle peut être très active dans des mouvements sexistes et islamophobes, est rarement au centre des foules numériques. «L’image que j’ai, raconte Yann Leroux, ce sont les foules du Mississippi avec plein de bonnes gens qui vont pendre un « nègre » et qui, ensuite, vont déjeuner l’après-midi avec les gamins. Les gens vont participer à des mouvements haineux et, cinq minutes plus tard, ils font quelque chose qui n’a rien à voir. Ils sont, pour la plupart, sûrement, des gens adorables et fréquentables.» Difficile à avaler, quand même, quand on voit la violence des propos tenus.
«Des gens normaux»
Yann Leroux persiste : «Je ne voulais pas gâcher mon point Godwin trop tôt, mais on a quand même des exemples dans l’histoire. Ce qui me frappe, c’est la rapidité avec laquelle ces groupes se font et se défont. Le fait de participer à une de ces foules, ça coûte un like, ou trente secondes pour écrire un message. Et ensuite, les gens se désengagent très vite, mais la trace qu’ils ont laissée sur Internet reste, et pour la personne qui est agressée, la foule est toujours présente.» En août 2016, la chercheuse américaine Whitney Phillips écrivait dans Time :«Ce sont pour la plupart des gens normaux qui font des choses qui leur ont paru amusantes sur le moment et qui ont des répercussions énormes. On aimerait dire que ce sont eux les méchants, mais c’est un problème qui nous concerne tous.»