« Neil Armstrong n’a jamais marché sur la Lune », « Il existe un projet secret visant à mettre en place une dictature oligarchique planétaire », « Al-Qaïda et Daech sont en réalité manipulés par les services secrets occidentaux »… Les théories du complot se suivent et ne se ressemblent pas. Longtemps moquées mais de plus en plus partagées, omniprésentes en ligne mais absentes des plateaux de télévision, ces constructions sociales paradoxales échappent aux analyses schématiques. Elles semblent pourtant partager un trait essentiel : celui de la croyance. Et si derrière les théories du complot se cachaient les nouvelles religions de la post-modernité ?
Nouvelles formes de sacré
A l’heure où l’intelligence artificielle, la destruction de notre écosystème ou les avancées de la médecine remettent en question les fondements de la condition humaine, le lent processus du désenchantement à l’œuvre dans les sociétés occidentales se voit troublé par de nouvelles formes de spiritualités. Des philosophies orientales dont la méditation est un exemple saillant, au culte des célébrités sur les réseaux sociaux, notre besoin de croire fait-il de la résistance face à une époque hyper matérialiste et hyper scientifique ?
Entre les années 1960 et 1980, la « mort de Dieu » paraissait entérinée, rendue inéluctable par l’extension de la méthode scientifique à tous les domaines de la vie
Comme l’explique Henri Tincq journaliste et écrivain spécialiste des religions, dans un article de Slate en octobre dernier, entre les années 1960 et 1980, la « mort de Dieu » paraissait entérinée, rendue inéluctable par l’extension de la méthode scientifique à tous les domaines de la vie, le déclin des confessions historiques, l’individualisme, la libération des mœurs sexuelles ou encore l’emprise des médias sur les esprits. Les certitudes de l’époque, que l’on pourrait réunir sous l’idée d’un progrès unidirectionnel des civilisations, a pourtant connu un lourd revers à la fin des années 70. Le « Comment vivre ? » des Trente Glorieuses a cédé sa place au « Pourquoi vivre ?” » oublié pour un temps.