Doc : « Les Routes de l’esclavage », l’héritage d’un drame universel

Portrait en studio d'une riche brésilienne sur une litière, avec ses esclaves, Sao Paulo, c 1860.

Surtout, les auteurs, Daniel Cattier, Juan Gélas et Fanny Glissant, réalisent ici le tour de force d’offrir une vision synthétique qui ne privilégie aucune des leçons « nationales » en cours, selon l’endroit d’où l’on interroge le crime. Ce faisant, ils corrigent nombre de lieux communs aussi tenaces qu’erronés pour donner les clés d’une intelligence réelle d’un héritage universel.

À l’origine, dans le monde antique, ce sont les guerres, les enlèvements et les razzias qui font l’esclave. Il est le butin d’une violence ordinaire sur lequel ne se fonde aucune logique économique. Au fil des extensions politiques de Rome, l’esclave est blanc le plus souvent, et le terme retenu, proche du « slave », dissipe toute ambiguïté. L’essor de l’islam, débordant de son berceau arabe pour gagner l’Egypte, va bouleverser la donne.

Le rôle capital des Portugais

L’esclave est certes toujours la force motrice, l’énergie essentielle au développement économique, mais il convient de le recruter parmi les mécréants. Et lorsque les projets pharaoniques des Abbassides sur le bas-Irak au IXe siècle ­requièrent toujours plus de bras, la pénurie d’esclaves incline à des tractations avec des peuplades chargées de fournir les hommes nécessaires aux marges de l’aire musulmane. C’est donc la culture du dominant qui fixe la différence, et non la peau ou l’origine.