Ligue du Lol : un petit cercle de harceleurs parisiens influents

Sexisme, racisme, homophobie : des journalistes, blogueurs, publicitaires ont insulté, humilié et harcelé. Pour cela, ils avaient créé un groupe sur les réseaux sociaux : La Ligue du LOL.

article publié sur le site du journal adolescent L’Actu, édité par notre partenaire Playbac presse,  le 19 02 2019

Contexte

1- La harcèlement se caractérise par une violence verbale et/ou physique qui se répète.
2- Les cas de harcèlement sont nombreux. Par exemple, le cyberharcèlement a lieu sur Internet. Des personnes malintentionnées créent de faux profils pour y diffuser des rumeurs, envoyer des messages d’insultes…
3- Depuis l’affaire Weinstein (producteur de cinéma accusé d’avoir harcelé et violé des dizaines de
femmes), fin 2017, la parole s’est libérée dans le monde et les témoignages se sont multipliés.
4- Le harcèlement a aussi lieu à l’école. Le site www.nonauharcelement.education.gouv.fr est destiné
aux victimes, aux témoins, aux parents, aux profs…Il propose des conseils et des outils pédagogiques.

Un petit cercle de harceler parisiens influents

Un groupe de journalistes, de blogueurs, de publicitaires … est accusé d’avoir harcelé de nombreuses personnes sur les réseaux sociaux.

Les faits

Depuis plusieurs jours, tu entends sans doute parler de la Ligue du LOL. L’ACTU te donne les clés pour mieux comprendre.

Comprendre

C’est quoi, la Ligue du LOL ? C’est le nom d’un groupe créé sur Facebook en 2009 par un jeune journaliste, Vincent Glad. Le groupe était surtout composé d’hommes : des journalistes parisiens, des blogueurs, des professionnels de la communication de la publicité. Ces membres étaient de fins connaisseurs des réseaux sociaux, alors en pleine expansion. Ils ont acquis leur popularité sur Twitter (très utilisé dans le monde de l’information et de la communication). Puis ils ont eux-mêmes été recrutés pour travailler dans des médias (télé, journaux…). Depuis, certains sont en poste à Libération, aux Inrockuptibles…

De quoi sont-ils accusés ? D’avoir harcelé sur les réseaux sociaux, surtout entre 2009 et 2012, des collègues, de jeunes journalistes… Notamment par le biais de photos, de vidéos, de gifs animés, parfois de montages porno… Certains ont proféré des injures racistes, sexistes, homophobes, antisémites. D’autres ont aussi harcelé leurs victimes dans la vie réelle. Vendredi 8 février, le quotidien Libération a publié un article après que des tweets ont resurgi. Après cette parution, de nombreuses victimes, notamment des femmes, ont témoigné. 

Vont-ils être condamnés ? La plupart des journalistes mis en cause ont publié des excuses. Cinq d’entre eux ont
été mis à pied à titre conservatoire (en attendant une décision définitive) par leur rédaction. D’autres médias ont mis fin à leur collaboration avec les personnes accusées. Certains journalistes ont quitté d’eux-mêmes leur poste. L’association SOS Racisme a demandé l’ouverture d’une enquête policière. Mais la plupart des faits sont prescrits.

Pourquoi c’est grave. Dans l’article de Libération, un ancien membre du groupe, Henry Michel, assure que
c’était « surtout des blagues qu’on ne pouvait pas faire en public. C’était brillant, c’était bête. […] C’est l’endroit où je me suis tapé les plus grosses barres de rire à l’époque». Il a toutefois fini par quitter le groupe. « Sous couvert d’une ironie, dénonce Laurent Joffrin, directeur de la publication de Libération, [ce comportement] véhicule une tripotée de clichés sexistes, machistes, homophobes et parfois racistes.» Dans tous les cas de harcèlement, qu’ils aient lieu dans une entreprise, une cour de récré ou sur les réseaux sociaux, les harceleurs ont le sentiment d’avoir tous les droits, d’être au-dessus de tout et de tous, dès lors qu’ils s’abritent derrière l’humour. Toutes les victimes disent avoir profondément souffert et être restées marquées. La journaliste Léa Lejeune, par exemple, a été une cible de la Ligue du LOL. Dans une vidéo publiée sur le média en ligne Brut, la jeune femme rappelle : «Le cyberharcèlement se rapproche beaucoup du harcèlement scolaire», souvent perpétré par des élèves «populaires». Pour certaines associations féministes, cette affaire montre aussi le manque de diversité dans les médias. Selon elles, elle est révélatrice du sexisme qui sévit dans ce milieu élitiste, avec des journalistes majoritairement masculins et blancs. Elles appellent à des changements concrets. Certains médias ont déjà commencé leur autocritique : fin 2018, trois journalistes du Huffington Post ont été licenciés
pour avoir insulté des collègues femmes dans un groupe privé («RBF», pour «Radio Bière Foot»). Des témoignages ont également fait état de l’existence de groupes similaires à la Ligue du LOL dans des écoles de journalisme. Un projet de loi contre la haine et le cyberharcèlement doit être présenté avant l’été. Parmi les
pistes : responsabiliser les plateformes, les obliger à mieux supprimer les contenus haineux, bannir l’anonymat sur les sites, etc.  S. Lelong

Mots clés

Élitiste  Qui favorise une élite, aux dépens du reste de la société.

LOL (Laughing Out Loud). Équivalent de « mort de rie »

Mise à pied  Suspension temporaire du contrat de travail d’un salarié ayant commis une faute. L’employé ne vient plus travailler et n’est plus payé. Cette procédure est souvent suivie d’un licenciement.

Prescrit
Ici, fait d’avoir dépassé le délai de prescription, au-delà duquel une action en justice n’est plus possible.

CHIFFRES CLÉS

30 personnes environ, des hommes surtout, ont fait partie du groupe le Ligue du LOL.

ans de prison et 45000 euros d’amende. C’est la peine maximale encourue par une personne coupable de cyberharcèlement. Actuellement, le délai de prescription est de six ans.

46,9% des journalistes sont des femmes. Seules 38% sont aux postes de rédaction en chef et 25,9% travaillent au sein des directions des rédactions, selon la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels.

 

Lien complémentaire avec témoignages vidéo de certaines victimes  :La « ligue du LOL », une affaire de cyberharcèlement choquante, mais hélas classique