« Sans aucune pitié » : des documents secrets confirment le projet de répression des Ouïgours en Chine

Ce sont des documents accablants. Le président chinois Xi Jinping a donné l’ordre dès 2014 d’être « sans aucune pitié » contre « le terrorisme » et « le séparatisme » dans la région à majorité musulmane du Xinjiang, selon des documents internes au régime communiste révélés par le « New York Times ».

article publié sur le site nouvelobs.com ,  le 18 11 2019

D’après des organisations de défense des droits de l’homme, plus d’un million de musulmans, principalement d’ethnie ouïgoure, sont en détention dans cette vaste région du nord-ouest de la Chine, à la suite d’une campagne de répression contre le terrorisme et l’islamisme engagée ces dernières années.

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Les plus de 400 pages de documents secrets publiés ce week-end par le prestigieux quotidien américain offrent un très rare aperçu des mécanismes de la répression des Ouïgours à l’œuvre au Xinjiang, en réaction à des attentats attribués à des indépendantistes.

Selon le « New York Times », cette énorme fuite laisse à penser que la politique suivie au Xinjiang ne fait pas l’unanimité au sein du pouvoir chinois. Les documents ont en effet été transmis par un membre de l’appareil, qui a émis l’espoir qu’ils empêchent le régime, y compris le président Xi, « d’échapper à sa culpabilité pour les détentions généralisées » dans cette région.

Les documents comprennent entre autres un discours secret de Xi Jinping de 2014, dans lequel le président chinois appelle à lutter « sans aucune pitié » contre « le terrorisme, l’infiltration et le séparatisme » en recourant « aux armes de la dictature démocratique populaire ». Ce discours a été distribué à partir de 2016 aux hauts fonctionnaires locaux pour justifier la répression, avec l’ordre de « rafler tous ceux qui doivent l’être ».

Contaminés par le « virus » de l’extrémisme

Pékin dément le chiffre d’un million de personnes en détention dans des camps de rééducation politique, préférant parler de « centres de formation professionnelle » destinés à lutter contre la radicalisation islamiste.

Parmi les documents cités par le « New York Times », figure un « guide » destiné à répondre aux questions des étudiants qui rentreraient au Xinjiang et s’interrogeraient sur le sort de membres de leur famille placés en détention. Les fonctionnaires sont invités à répondre que ces proches n’ont pas commis de crime mais ont été contaminés par le « virus » de l’extrémisme et doivent suivre un traitement « avant que la maladie ne dégénère ».

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Les étudiants sont en outre incités à se tenir tranquilles, leur comportement ayant une incidence sur la durée de détention de leurs proches.

La politique suivie au Xinjiang a été condamnée par les pays occidentaux. Mais, à en croire un discours de Xi Jinping cité par le « New York Times », ce dernier s’attendait à essuyer ces critiques. « Ne vous inquiétez pas si des forces hostiles pleurnichent ou salissent l’image du Xinjiang », avertissait-il dès mai 2014, selon le journal.

Lien complémentaire : Sur le site Oumma.com, on peut lire un article publié en mars 2019 qui prend à contre pied la vision qualifiée « occidentale » de la situation des Ouïghours  : « les adversaires irréductibles du régime chinois font feu de tout bois : ils vont désormais jusqu’à incriminer son hostilité présumée à l’égard de l’islam. Or cette accusation repose sur du vent ».  Pour l’instant le site n’a ni repris ni commenté l’enquête du New York Times

lecture complémentaire : l’article le plus complet sur les « China cables » Le Monde