Lorsque nous avons discuté en mai, Mekhennet rentrait tout juste de Manchester, où elle a couvert le bombardement qui a fait 23 morts, dont Salman Ramadan Abedi, l’assaillant britannique d’origine libyenne de 22 ans. Mekhennet a parlé avec des membres de sa communauté, ainsi que des fidèles de la mosquée qu’il fréquentait pour mieux comprendre sa radicalisation.
Ses mémoires commencent par l’histoire passionnante de sa rencontre avec Abu Yusaf en 2014, commandant de l’État islamique et superviseur de l’homme qui se fera connaître sous le nom de « Jihadi John » (et dont Mekhennet révélera l’identité au grand public). Elle a été invitée à rencontrer Abu Yusaf seule, le soir, le long de la frontière entre la Turquie et la Syrie – malgré les avertissements de l’unité antiterroriste allemande, persuadée qu’il s’agissait d’un complot pour l’enlever et la marier à un militant. Tout au long de l’histoire de leur rencontre, Mekhennet souligne les parallèles entre leurs antécédents, la marginalisation rencontrée (« Pour pouvoir grandir dans mon pays d’origine [l’Allemagne] en tant que migrant, ou même en tant qu’enfant de migrants, il faut s’aligner et louer le côté progressif de l’Europe »), ainsi que les différentes mentalités adoptées, les différents chemins choisis.