Julia Montfort a hébergé pendant plus d’un an un jeune tchadien demandeur d’asile, une expérience de vie qu’elle raconte dans un livre : Carnets de solidarité, aux Editions Payot. Le récit d’une expérience intense et solidaire.
article par Emmanuelle Hunzinger publié sur le site France 3 Paris, le 10 11 2020
Julia et Cédric ont ouvert leurs portes à Abdelhaq, un exilé tchadien. Pendant un an et demi, ce jeune demandeur d’asile va vivre chez eux et avec eux, en banlieue parisienne. Ils vont peu à peu apprendre à se connaître et vivre ensemble.
Cela faisait quelques années que je voulais faire quelque chose, que je voulais agir
« J’ai vu une annonce sur le réseau social de l’école Thot, (NDLR, cette école enseigne la langue française aux personnes en situation d’exil, aux réfugiés et aux demandeurs d’asile). On a sauté sur l’occasion. 48 heures plus tard, Abdelhaq est arrivé chez nous« , témoigne Julia Montfort. Le jeune homme devait rester une semaine. Julia et Cédric vont l’accueillir plus d’un an.
Abdelhaq a fui son pays, le Tchad. Son père et sa mère se sont opposés au régime d’Idriss Déby qui dirige le pays depuis 1990. L’adolescent de 14 ans est emprisonné et torturé. Il réussit à s’enfuir, passe en Libye qu’il fuit une nouvelle fois. Une longue et difficile errance de 5 ans avant de risquer sa vie en traversant la Méditerranée comme beaucoup d’autres candidats à l’exil. Abdelhaq est pris en charge par des associations. La journée, il suit les cours de l’école Thot pour appendre la langue française. Mais comme beaucoup d’autres migrants, il passe ses nuits dehors.
Leur histoire commune commence autour d’un repas. « Le jour où Abdelhaq est arrivé chez nous, je me suis sentie un peu bête. Je me suis dit que cela allait être long puis nous avons mangé ensemble« . L’expérience de l’accueil débute. « L’hospitalité c’est d’abord une épreuve, l’inconnu qui rentre dans votre maison. J’ai eu des craintes, je me suis posée des questions. Certaines étaient totalement irrationnelles. Au fil du temps, nous avons appris à nous connaître« , confie-t-elle.
Jour après jour, Julia Montfort va consigner leur vie commune dans ses carnets. « Je me suis dit qu’il serait intéressant de creuser mes réfléxions, poser mes interrogations, de les analyser et les partager« , explique-t-elle. Un documentaire a également été tiré de cette expérience d’accueil et de solidarité.
Vous pouvez retrouver la websérie « carnet de solidarité » avec notre article “enfants, ados, l’éveil à l’hospitalité.. »
Accueillir des réfugiés est un acte de résistance
« Accueillir des réfugiés est un acte de résistance aujourd’hui », livre Julia Montfort. « A Calais il est interdit de distribuer de la nourriture aux migrants.Tendre la main à des demandeurs d’asile reste un combat aujourd’hui », explique-t-elle. Dans ce récit, Julia Montfort dit ne pas vouloir donner de leçon. « Juste raconter une histoire singulière qui fait écho à d’autres histoires ». Mais elle n’oublie pas sa profession de journaliste et affirme également « vouloir lutter contre les idées simplistes » qui rongent notre société.
Abdelhaq qui a aujourd’hui 24 ans a été débouté pour la deuxième fois de sa demande d’asile Il est hébergé dans une communauté Emmaüs en province où il apprend la vente et la restauration en attendant son avis de reconduite à la frontière.
Il est difficile de connaître le nombre de sans-papiers en France. Les estimations varient entre 300 000 et 400 000. Un nombre en augmentation depuis la crise migratoire de 2015.
Selon l’ Ofpra, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, 138 614 personnes ont demandé l’asile en France. Seuls 36 512 ont obtenu le statut de réfugié en 2019.