Valérie, 17 ans, gagne le Concours de plaidoiries des lycéens

Vendredi, le Mémorial de Caen (Calvados) a organisé le 22e Concours de plaidoiries des lycéens.  Seuls ou en duo, les 14 finalistes ont défendu les droits de l’homme. Ils se sont adressés à un public d’environ 3 000 personnes et aux 12 membres du jury (journalistes, avocat, membres d’associations…) – Quatre plaidoiries ont été récompensées. Valérie Tete a gagné deux prix : le 1er prix (récompensé par trois jours à New York et la visite du siège de l’ONU), ainsi que le prix attribué par un jury de lycéens.

article extrait du journal L’Actu, édité par notre partenaire Playbac presse

« Seul tort de ces enfants : être nés différents ou pauvres »

Une Rennaise est la lauréate de l’édition 2019 du Concours de plaidoiries des lycéens. Voici la cause qu’elle a défendue face au public et au jury.

Les faits
Les mots et la conviction de Valérie Tete ont emporté le jury du Concours de plaidoiries des lycéens, vendredi, à Caen (Calvados). En terminale ES au lycée François-René-de-Chateau­briand de Rennes (Ille-et-Vilaine), cette élève de 17 ans a gagné le 1er prix. Elle a dénoncé le sort d’enfants accusés de sorcellerie par des marabouts et victimes de sévices parfois mortels, au Togo (Afrique).

Comprendre Valérie a commencé sa plaidoirie avec l’histoire de Sylvain, 7 ans, vivant dans un village du nord du Togo. L’enfant est un brillant élève, en avance sur son âge. Le jour où son père meurt brutalement, les deux autres épouses de son père cherchent un coupable. Un marabout désigne Sylvain, dont la maman serait une grande sorcière. Sylvain passe trois ans entre les mains d’un marabout, un « charlatan ». Il vit dans une cage, puis est attaché à un arbre et fouetté chaque jour pour « être délivré de ses démons invisibles ». Sylvain est loin d’être un cas isolé. Valérie évoque aussi le sort de Daniel et Pascal, 9 ans. « Leur seul tort était d’être différents, d’être nés dans une famille pauvre et dans un pays qui ferme les yeux sur leur condition. » Ce pays, rappelle-t-elle, a pourtant signé de nombreux textes visant à protéger les enfants. Depuis 2017, il existe un Code togolais de l’enfant. Valérie ne se contente pas d’un constat accablant. Des solutions existent. Une association, Creuset Togo, a ainsi sauvé Sylvain. « Je refuse de tomber dans la fatalité. Je crois qu’en […] promouvant l’action d’ONG, en demandant à l’État togolais de prendre ses responsa­bilités et d’appliquer toutes ces lois et conventions qu’il a signées, on peut éviter d’autres morts d’innocents », conclut la jeune fille. Elle est appelée sur scène pour le prix attribué par le jury de lycéens : « C’est beau de recevoir ce prix de votre part », remercie-t-elle. Quelques minutes plus tard, le 1er prix lui est remis par Philippe Geluck, le président du jury. Elle est rejointe sur scène par ses parents, très émus. Valérie avait 5 ans lorsque sa famille a quitté le Togo : « C’est fou ! J’ai failli renoncer, pensant que ce concours était pour des gens différents de moi, avec un autre parcours, plus de facilités. J’ai continué, encouragée par ceux qui croyaient en moi. » La suite ? Obtenir le bac, puis aller au Togo cet été et organiser une collecte pour Creuset Togo.
A. Nait-Challal, à Caen

 

« L’humiliation peut nous anéantir »

Les autres lauréats ont évoqué la liberté d’expression, le harcèlement scolaire et la vie des femmes sans abri.

Abdallah Charki, en terminale STMG à Pithiviers (Loiret), a reçu le 2e prix avec une plaidoirie contre le harcèlement scolaire, « Pleure en silence ». Il revient sur l’histoire de Jonathan, 11 ans, qui s’est immolé par le feu après avoir été le souffre-douleur d’élèves de sa classe, en CM2 et au collège. Abdallah, qui avait des problèmes d’élocution, a lui-même été harcelé : « Je veux dénoncer l’humiliation. Parfois elle peut nous construire, mais souvent nous anéantir. » Censure Le 3e prix revient à Amélie Cassagne, en terminale L à Avignon (Vaucluse), pour sa plaidoirie « L’art d’être censuré ». Elle a dénoncé la censure en Russie, notamment à l’encontre du metteur en scène et cinéaste Kirill Serebrennikov, assigné à résidence. « Personne n’en parle et on doit le faire. C’était essentiel pour moi », explique cette jeune fille pétillante, qui rêve d’être avocate tout en continuant à faire du théâtre, sa passion. Enfin, le 4e prix est pour Elena Hourdin Solovieff, 15 ans, en seconde à Vincennes (Val-de-Marne). Elle s’est indignée du sort des femmes vivant dans la rue en France : « C’est la première violation des droits de l’homme à laquelle je suis confrontée. Ces femmes, je les vois tous les jours », s’insurge-t-elle. A. N.-C. 

MOTS CLÉS

Assigner à résidence Contraindre un individu à ne pas sortir de chez lui. Marabout Ici, guide spirituel. Plaidoirie Action de plaider, défen­dre oralement une cause. Sévice Mauvais traitement infligé à une personne.

CHIFFRES CLÉS

2 duos étaient présents parmi les 14 finalistes. Cécilia et Axel ont dénoncé le dictateur tchétchène, qui condamne à mort les homosexuels. Violette et Zoé se sont indi­gnées qu’aux États-Unis on puisse, via une petite annonce, donner un enfant adopté.

1 200 candidatures sur vidéo ont été reçues par le Mémorial de Caen. Le concours est ouvert aux lycéens de France métropo­litaine et d’outre-mer, ainsi qu’aux élèves des lycées français à l’étranger.

8 minutes de temps de parole ont été accordées aux candidats pour leurs plaidoiries

Lien complémentaire : découvrir le site du mémorial de Caen