Interdiction des signes religieux : le Québec se rebelle au pays du multiculturalisme

Une réaction qui n’a rien de surprenant de la part de ce chantre du multiculturalisme qui, en 2013, comparait la laïcité à… la ségrégation raciale aux Etats-Unis dans les années 50. Pourtant, pour bon nombre de Québécois, le texte est encore trop timide. En effet, les éducatrices en garderie ne sont pas concernées par l’interdiction des signes religieux. De plus, la « clause grand-père » inclue dans le projet empêche tout effet rétroactif. En d’autres termes, les fonctionnaires qui portent déjà un voile ou une kippa pourront continuer à le faire.

« Les tenants du multiculturalisme, au Québec
comme ailleurs, ont la fâcheuse tendance à présenter leurs opposants comme des intolérants et xénophobes »

La réaction d’Ottawa ne surprend pas les Québécois. Pour l’historien Eric Bédard, « les tenants du multiculturalisme, au Québec comme ailleurs, s’arrogent le monopole du bien et ont la fâcheuse tendance à présenter leurs opposants comme des simples d’esprit, repliés sur eux-mêmes, intolérants et xénophobes ». Et de regretter un débat « hystérisé ».

QUÉBEC VS CANADA

Entre le Québec et le reste du pays, il y a en effet une véritable différence d’approche. Au niveau fédéral, le fait qu’une femme ait été autorisée par le passé à témoigner dans un procès entièrement voilée avait été vu par certains comme « un progrès ». Quant au niqab, il est même autorisé lors des cérémonies de citoyenneté. Difficile dans ces conditions pour les aficionados du multiculturalisme de comprendre la position des Québécois, influencés par la laïcité à la française. « Le voile est désormais perçu comme une composante même de l’identité canadienne, le symbole de la tolérance », explique Patrick Taillon, professeur de droit public à l’Université de Laval. Alors que pour les Québécois, le rôle de l’Etat ne devrait pas être la valorisation des religions mais plutôt une forme de retenue, du moins dans certains domaines.