Les bénévoles sont des acteurs essentiels de la solidarité et de la vie associative en France. Mais parfois ils fatiguent, faute de moyens financiers. Le gouvernement leur promet une enveloppe de 28 millions d’euros.
En crise, les associations ? On a du mal à le croire, surtout ce week-end où, partout en France, sur les places et dans les gymnases, des millions de bénévoles derrière leurs stands s’apprêtent à incarner la France qui se bouge, celle du club de foot, du groupe de percussions, des distributions de repas et des collectes de jouets, celle qui soigne les blessés dans les concerts, qui apprend aux enfants à nager, qui aide des personnes handicapées à trouver du travail et des migrants à s’insérer.
Au total, selon le baromètre 2019 de France bénévolat, 20 millions de personnes consacrent du temps aux autres, dont 15 millions au sein d’associations qui ont su, dans tous les secteurs, se rendre indispensables. Et pourtant, elles souffrent, secouées dans une grande lessiveuse.
La chute libre des subventions publiques, et pour certaines la suppression des ballons d’oxygène qu’étaient les emplois aidés et les dons liés à feu l’impôt sur la fortune, les fragilisent. Le gouvernement, comme pour compenser, leur promet aujourd’hui une enveloppe de 28 millions d’euros.
Des prestations revues à la baisse
Mais surtout, il leur faut muter à toute vitesse, pour continuer à tenir par tous les bouts une société dispersée, façon puzzle. « C’est comme si chacun était dans un silo : les mamans à poussette, les vieux, les délinquants, les cadres… Il faut inventer pour faire se rencontrer les gens », observe Bruno Jarry, directeur général du Clavim, à Issy-les-Moulineaux, une grosse machine culturelle et sociale aux 8 500 adhérents et 220 emplois. Face aux moyens en berne, elle a dû revoir certaines prestations à la baisse : les colos des enfants ont été ramenées de 18 à 15 jours.
« La crise des Gilets jaunes, les associations l’ont vue venir de loin, assure Philippe Thillay, secrétaire général d’Association et territoire, un observatoire du tissu local basé en Normandie. De plus en plus de petites associations n’adhèrent plus aux grandes fédérations, et de plus en plus de bénévoles s’engagent hors des associations. »
Fini les retraités corvéables à merci
Et de souligner la disparition progressive des héros d’antan, ces retraités corvéables à merci, année après année. « Aujourd’hui, plus de la moitié des Français n’ont pas les mêmes horaires de travail d’une semaine sur l’autre, l’espérance de vie d’un mariage est de cinq ans et les seniors sont sursollicités par les séjours sur Lastminute.com… Comment faire du bénévolat durable avec des bénévoles éphémères ? » questionne-t-il.
« On a du mal : ce n’est pas humain, quelqu’un sur qui tout repose ! », répond Bénédicte, 70 ans, rencontrée ce vendredi au forum d’Issy-les-Moulineaux, derrière le stand du secours catholique. « Nous avons beaucoup de volontaires pour les maraudes avec les sans-abri, parce que les gens peuvent venir après le travail. Pour le reste, c’est plus dur… »
Dans sa structure de 80 bonnes âmes, la décision a été prise de diviser le travail administratif à temps plein dont personne ne voulait. « Maintenant, on est sept à se partager la tâche », raconte la paroissienne.
«Je partais davantage en congés quand je travaillais !»
Les fine aiguilles de « Pique et coud » ont un autre problème : effectuer leurs demandes de subventions en ligne. « Tout le monde n’a pas l’habitude d’Internet ou le matériel informatique qu’il faut », souligne Michel Correard, qui préside l’Alim, un regroupement de petites associations à Issy.
Sa carrière de bénévole a commencé il y a vingt ans, quand il s’est retrouvé propulsé trésorier de son club de boxe quinze jours après son adhésion… Il a pris goût à l’associatif, lui le dirigeant de l’Avia Club, « le club de boxe de Belmondo ! » Mais, confesse-t-il, « j’ai 75 ans, et j’aimerais bien profiter un peu… Je partais davantage en congés quand je travaillais ! »
Pour tenir son stand au forum des associations, Michel s’est résolu à écourter ses vacances en Corse. « Quand je pense que la mer est à 27 degrés… », rêve-t-il.