Sous les abris de toile, les casseroles sont encore sur le feu et quelques affaires sont restées à côté des matelas pneumatiques. Mardi matin, les quelque 600 réfugiés tibétains du camp d’Achères, voire entre 700 et 750 selon les bénévoles qui s’occupent d’eux, ont été évacués par la Préfecture après un arrêté pris par Marc Honoré, maire (DVD) de la commune. « Ce n’était pas possible de les laisser dans une situation d’indignité qui plus est avec le froid qui arrive », explique Annie Dubray-Gyrard adjointe au maire présente sur le site.
article par Thibaut Chéreau, publié sur le site leparisien.fr, le 3 12 2019
« Ce sont des gens très respectueux »
En août, quelques tentes sont apparues entre la forêt de Saint-Germain-en-Laye et des immeubles en construction proche de la gare d’Achères-ville. « Ce sont des gens très respectueux, indique Annie Dubray-Gyrard. Ils n’ont d’ailleurs jamais causé de problèmes dans la ville. » L’afflux de migrants a donné naissance à un camp de plusieurs centaines de mètres de long le long d’un chemin. Seulement deux robinets d’eau étaient accessibles aux centaines de Tibétains.
Après une évacuation dans le calme, les réfugiés ont été emmenés en bus vers différents lieux d’hébergement à Mantes-la-Ville, Versailles, Saint-Germain-en-Laye et Villepreux. Le gymnase réquisitionné d’Houilles-Carrière-sur-Seine ne servira finalement pas. « Les Tibétains sont partagés, explique Hermès l’une des bénévoles présente sur le camp, qui parle couramment leur langue. Ils me disent qu’ils sont contents d’être au chaud mais tristes d’être séparés, des liens avaient commencé à se former entre eux. »
À Villepreux, 90 hommes célibataires ont été logés provisoirement dans le gymnase Alain-Mimoun. Une équipe de vigiles filtre les entrées. Impossible d’accéder au bâtiment, même pour échanger quelques mots avec les réfugiés. « Nous faisons ça pour assurer leur sécurité et leur intimité », se justifie Delphine Regard, l’une des responsables de l’association ACR (Agir combattre réunir) à qui l’Etat a confié la gestion du lieu. « Tous ceux que nous accueillons auront des tickets services pour manger et pourront entamer les démarches pour être régularisés. »
Le contre-la-montre des bénévoles
Dès la fin de l’évacuation du camp, une course contre-la-montre a débuté pour les bénévoles. « Nous avons jusqu’à demain soir pour récupérer le maximum de matériel, résume Serge, la cinquantaine, qui consacre six jours de la semaine à l’aide aux Tibétains. Je fais tout pour leur apporter de la nourriture et des bâches. » Équipé d’un chariot, il fait le tour des abris à la recherche de tentes en bon état, d’ustensiles de cuisine ou de bâches épaisses. « J’en suis à ma quatrième évacuation de camp, poursuit-il. Tout ce qu’on aura sauvé servira à d’autres réfugiés. »
Parmi les bénévoles, on retrouve aussi de jeunes tibétains déjà pris en charge par les associations. « Je suis venu pour donner un coup de main », glisse Tsejin, 17 ans. Arrivé en France après deux ans de périple à pied entre le Népal et la France, cet ancien gardien de yak confie être passé par « des moments difficiles ».
Les passeurs leur promettent de « vivre à Paris »
Les Tibétains arrivent de plus en plus nombreux dans les Yvelines. L’hospitalité française et l’action efficace des associations du département seraient devenues un argument utilisé par les passeurs pour convaincre les candidats au départ. « Ils leur promettent de vivre à Paris et résultat, ils se retrouvent dans une forêt à 25 kilomètres de la capitale, dénonce Hermès. Malgré ça, beaucoup me disent qu’ils préfèrent être là car en France ils sont libres. »
L’hébergement des Tibétains par la préfecture doit prendre fin début janvier. D’ici là, Stéphane Grauvogel, sous-préfet de Saint-Germain-en-Laye, indique que « chaque dossier sera examiné. » Des logements doivent mis à la disposition des réfugiés tibétains. L’Île-de-France étant saturée, ils seront probablement situés en province.