Comment ont évolué les actes anti-musulmans depuis quelques années ?
Ils sont structurellement peu nombreux, de l’ordre de 100 à 200 faits par an. Il y a eu une flambée au premier semestre 2015, à la suite des attentats : 178 actes pour le seul mois de janvier, soit plus qu’au cours d’une année « normale ». En 2018, le nombre d’actes anti-musulmans est retombé à 100, c’est-à-dire deux par semaine pour toute la France. Certes il y a de la sous-déclaration, mais cela touche toutes les catégories d’actes racistes. Certes, il faudrait ajouter certains actes dirigés contre des personnes maghrébines qui visent autant la religion que l’origine. Mais la violence physique ou verbale n’est pas ce dont les musulmans souffrent le plus : ils sont d’abord victimes de la relégation sociale, des préjugés, de discriminations. Le phénomène touche inégalement le territoire national, mais dans certaines régions où je me rends souvent, dans les Hauts-de-France, en Occitanie ou en PACA, par exemple, cette mise à l’écart est visible dans le partage de l’espace, et audible dans les discours. C’est pour cela que lutter contre le racisme sans une politique énergique de lutte contre les discriminations, de résorption des ségrégations spatiales et de lutte contre les inégalités d’accès à l’emploi et au savoir, je n’y crois pas beaucoup. On le voit d’ailleurs : que fait-on pour casser les ghettos ? Pas grand-chose, il faut bien le dire. Je suis pour une parole républicaine forte ; mais une parole républicaine forte sans action déterminée pour résorber les inégalités, cela ne vaut pas grand-chose…