Condamner cette provocation, refuser le dévoiement de la laïcité, ne pas confondre le combat des idées avec le dénigrement des personnes, voilà qui devrait nous unir. Pour autant, c’est vrai, la pétition parue sur une pleine page du Monde pose question : à la fois par ce qu’elle dit, en pointant un index accusateur non pas seulement, et en fait non pas tellement, vers le Rassemblement National, mais plutôt vers la droite et la gauche républicaines, en particulier vers Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Education nationale, lorsqu’il dit que le voile des mères accompagnatrices est autorisé mais qu’il n’est pas « souhaitable ». Refuser l’amalgame entre islam et islamistes, c’est nécessaire ; mais si c’est pour tomber dans un autre amalgame, entre républicains et extrême-droite cette fois, ce n’est pas mieux. Mais cette pétition interroge aussi par ce dont elle ne parle pas, c’est-à-dire un contexte marqué par le dernier attentat islamiste à la préfecture de police, et par la progression régulière d’un islam radical qui, pour n’être pas toujours violent, porte des valeurs qui sont le contraire des principes de la République, et qui fonctionnent en partie sur des ressorts communs à ceux de l’extrême-droite : la dialectique « eux et nous », l’obsession pour l’identité, etc. Mal poser les sujets ou retenir des critères contestables pour lutter contre la radicalisation, évidemment ce n’est ni à encourager, ni à défendre : l’exécutif, qui a décidément du mal à tenir une ligne claire sur ces questions compliquées, s’attire des reproches justifiés lorsque le ministre de l’intérieur fait un portrait-robot caricatural du « radicalisé » (il n’y a qu’à le comparer aux profils des jihadistes ayant sévi ces dernières années pour s’apercevoir qu’une barbe longue n’est pas prédictif d’un passage à l’acte…). Mais cela n’invalide pas la lutte contre la radicalisation dans son ensemble : le risque terroriste n’est pas une fabrication de l’extrême-droite, la progression du séparatisme sur fond de prosélytisme islamiste non plus ! Là-dessus, la pétition du Monde reste silencieuse, comme si cela n’existait pas.
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