« Il y a aussi des classes qui participent moins, plus silencieuses, ce qui provoque chez nous un regain d’attention, car on se dit que peut-être ce silence veut dire plus. Que certaines jeunes filles se prennent cette information en pleine figure, et que peut-être parmi elles, certaines découvrent qu’elles sont à risque, ou même qu’elles ont subi une excision. C’est d’ailleurs arrivé une fois. Une jeune fille en a parlé après avec son infirmière scolaire « ,ajoute la militante, qui précise n’avoir reçu à ce jour aucun retour négatif sur ces interventions.
Tchat et témoignages
La campagne se mène bien-sur via les réseaux sociaux et internet. Grâce à un tchat, les jeunes filles peuvent échanger, anonymement, leurs doutes, leurs infos, et partager leurs témoignages.
En ligne, on trouve aussi des tests sous forme de questionnaires « Comment savoir si j’ai été excisée ? », « Comment savoir si je risque de subir une mutilation génitale féminine ? », un clip mais aussi les histoires de Ramata, O., F. et de bien d’autres. Des jeunes filles et jeunes femmes excisées.
Témoignage à retrouver sur le site Excision parlons-en
O. a aujourd’hui 20 ans, la jeune fille née en France raconte son excision et celle de sa soeur lors de vacances en Guinée : « J’ai été excisée à 9 ans en Guinée, avec ma sœur ainée qui avait 14 ans à l’époque. Je crois que ma sœur avait été prévenue par une cousine de ce qui nous attendait ; moi je ne savais rien. Ça s’est passé chez ma grand-mère paternelle où nous étions en vacances. Là, une femme est venue. Elle a demandé à ma tante de faire entrer ma sœur. J’attendais dans le jardin avec ma mère que j’ai soudain sentie très triste et inquiète. Quand ma tante m’a demandé d’entrer, j’ai vu ma sœur assise contre un mur tétanisée, l’entrejambe ensanglanté. (…) Je me souviens m’être réveillée sur un lit, ma famille venait me féliciter d’être devenue « une femme ». Je ne savais ce que ça signifiait mais je les croyais. A 13 ans j’ai découvert en cours d’histoire que ce que j’avais subi était « un crime ». Ma mère s’est excusée. Je crois qu’elle a une position ambiguë vis-à-vis des traditions. Elle souhaite que nous ayons un emploi pour être indépendantes, ma sœur et moi, mais avec mon père, elle envisage de nous proposer des hommes en mariage. Moi, je souhaite avoir recours à une chirurgie réparatrice, être amoureuse et libre. Je ne veux pas être soumise. »
Cet autre témoignage, celui de Ramata, 38 ans, française d’origine malienne : « J’ai été excisée avant ma venue en France et j’ai appris mon excision à 16 ans lors de ma 1ère visite chez le gynécologue. Comme je n’avais aucun souvenir de ce qu’on m’avait fait, ni de ce que cela voulait vraiment dire, j’ai été très étonnée. J’ai préféré occulter tout cela et je n’en ai parlé à personne de ma famille. Quatre ans plus tard, je me marie et attends mon premier enfant. Le médecin m’a expliqué que les mutilations génitales pouvaient entraîner des complications au moment de l’accouchement. C’est là que j’ai décidé d’en savoir plus sur ce qui m’était arrivé. Je me tourne alors vers ma mère qui balaie rapidement le sujet. «Ça n’est rien, il ne faut pas y faire attention. C’est la coutume et ça se passe comme ça.» Fin de la conversation. C’est après avoir vu une campagne du GAMS et plusieurs documentaires à la télévision que j’ai décidé de me lancer dans des recherches sur les mutilations sexuelles féminines. J’ai ensuite entendu parler du professeur Foldès et de la chirurgie réparatrice. Je me suis faite opérer en 2006, à 26 ans, et ai décidé de rompre avec le tabou familial sur l’excision en abordant le sujet avec mes sœurs. Mes petites sœurs sont tombées des nues, c’était un choc. »
Ou encore l’histoire de F., française partie en vacances en Guinée, pour ses 12 ans : « Les vacances en Guinée : toute joyeuse, pour la première fois, avec ma sœur aînée, nous allions découvrir le soleil, la mer et la plage durant les grandes vacances, de quoi rendre jalouses les copines au retour ! Mais les vacances se sont transformées en cauchemar. Nous avons été excisées avec nos cousines chez notre grand-mère. Une femme nous a tenu les jambes, une seconde nous écrasait la poitrine pour nous empêcher de crier et une troisième tranchait à vif dans les chairs. Je n’oublierai jamais les cris, en particulier de ma sœur, qui depuis est handicapée mentale ».