Avec la Fédération des mères combattantes, Nathalie Birimta lutte contre le fléau des rixes

Les Trophées « ellesdeFrance » ont célébré quatre habitantes pour leurs actions menées dans les domaines de l’innovation, de la création, de la solidarité, ainsi que du courage et du dépassement de soi. Attribuée par les internautes, une cinquième récompense, le Prix Simone Veil, a été décernée à une personnalité pour son engagement. Aujourd’hui, nous vous présentons Nathalie Birimta, lauréate du Prix courage et dépassement de soi et présidente de la Fédération des mères combattantes. Qui est elle ?
Article par Floriane Valdayron publié sur le site lesinrocks.com le 12 05 2022

Une femme forte, à la voix empreinte d’une dignité qui force l’admiration, teintée d’une douceur et d’une énergie enveloppantes. Arrivée dans le 19ème arrondissement de Paris en 2000 après avoir grandi au Tchad et entrepris des études de pharmacie en Italie, Nathalie Birimta enchaîne les emplois alimentaires, puis passe le concours d’infirmière. Alors qu’elle exerce comme vacataire, elle voit sa vie basculer le 23 octobre 2018, le jour où son fils Henry, 17 ans, est tué à coups de couteau dans une rixe entre deux bandes rivales.

Rencontre avec les familles voisines, sensibilisation… “J’ai voulu prendre le problème à bras-le-corps, tout faire pour que les jeunes ne se battent plus”, raconte-t-elle. Petit à petit, elle constitue un réseau qui sera reconnu le 13 avril 2019, avec la création de la Fédération des mères combattantes“Nous devons travailler ensemble”, martèle la lauréate. Objectifs: alerter, donner la parole à ces femmes qui ne l’ont pas, qui “subissent”, pour, in fine, mettre un terme aux règlements de compte.

“Toutes ces mamans, souvent issues de l’immigration, illettrées et amenées en France par leur mari, sont victimes de violences conjugales, dénonce Nathalie Birimta. J’ai aussi fondé le collectif pour écouter leur cri d’alarme, comprendre pourquoi l’éducation de leurs enfants leur a échappé et les aider à y remédier.” Les mots-clés: dialogue et échange. “Tout passe par là, reprend-elle. Je leur dis de parler avec leurs ados et de les embrasser.”

Pourquoi a-t-elle gagné un Trophée ellesdeFrance ?

Désormais, le quartier est uni. “Tata ! Comment tu vas?” : dès qu’elle sort sur la place des Fêtes, l’infirmière alterne embrassades et accolades avec les jeunes. Les parents, eux, sont connectés grâce à un groupe WhatsApp, où ils sont alertés dès qu’une rixe est sur le point de se produire. En parallèle, des réunions sont fréquemment organisées pour inciter les mères à sortir et à trouver des activités pour occuper leurs enfants. “Elles commencent à s’exprimer”, se réjouit Nathalie Birimta.

Ce qui nourrit son engagement, c’est son travail. En août 2019, elle intègre le service psychiatrie du centre hospitalier Sainte-Anne, motivée par deux questions: “Quel est l’élément déclencheur qui pousse à tuer?” et “Comment aider ces personnes?”. Une profession qu’elle a choisi d’exercer la nuit, afin de privilégier le contact et l’écoute. “Les patients sont plus accessibles: on arrive à discuter avec eux, on peut essayer de les comprendre”, explique la soignante, qui rencontre “des assassins comme des avocats et des jeunes de tous les milieux sociaux”, dont le benjamin a 14 ans.

Une manière aussi rude que passionnante d’apporter sa pierre à l’édifice. “Évoluer dans ce milieu contribue énormément à mon action au sein de la fédération, reprend Nathalie Birimta. Ça me donne de la force”. Il y a deux ans, impossible de prononcer le nom de son fils sans que les larmes ne coulent. “Aujourd’hui, je peux dire que j’essaie de générer du positif par rapport à Henry”, conclut-elle.

Depuis quatre ans, la Région Île-de-France récompense des Franciliennes aux profils divers, engagés et inspirants à l’occasion des Trophées ellesdeFrance. La quatrième cérémonie, organisée le 8 mars 2022, a permis de mettre en lumière et de promouvoir ces personnalités qui s’engagent pour une société plus juste et innovante