La société civile indienne se mobilise contre l’islamophobie

Certains manifestants, comme l’universitaire Prabir Prukayastha, estiment que ces attaques sont encouragées par ces nationalistes hindous : «Il y a une croissance coordonnée de cette haine et de ces violences, des campagnes sont organisées sur WhatsApp [une application de messagerie, ndlr], des groupes envoyés pour attaquer les camions qui transportent du bétailEt le gouvernement ne condamne jamais ces actes, ce qui prouve sa complicité.» Amnesty International vient d’exhorter les dirigeants indiens à réagir pour faire cesser cette «apparente impunité» des crimes islamophobes et a dressé une liste de tels actes rapportés par les médias : au moins dix musulmans ont été tués en deux mois dans huit attaques menées dans tout le pays par des extrémistes ou des groupes de gens qui leur reprochaient de transporter des vaches, de détenir de la viande de bœuf ou de simplement flirter avec des filles hindoues.

«Tout musulman devient une cible»

L’abattage de la vache, animal sacré dans l’hindouisme moderne, est très réglementé mais n’est pas totalement interdit en Inde – et son dépeçage est autorisé si le bovin meurt naturellement. Mohammad Jabir, un musulman venu à la manifestation, vit ce racisme au quotidien dans son village de Muzzafarnagar, situé à 130 km de New Delhi. «Il y a deux ou trois mois, un homme qui portait une longue barbe a été suivi par un groupe, et ils l’ont tué d’un coup de pistolet, raconte-t-il. Ce genre d’incidents arrive souvent maintenant. Tout musulman devient une cible.» Cette bourgade a justement été le théâtre de pogroms antimusulmans en 2013, qui ont coûté la vie à 62 personnes et auraient été manigancés par des députés locaux du BJP – deux d’entre eux ont été mis en examen pour ces actes, mais viennent d’être réélus avec le soutien du parti.