« On dit ‘submersion’ pour quelques milliers de personnes, c’est absurde »

Depuis la semaine dernière, plusieurs milliers de migrants ont débarqué sur les plages de Lampedusa, cette petite île au large du sud de l’Italie. Ils viennent des côtes tunisiennes, libyennes mais avant cela de pays d’Afrique subsaharienne ou encore d’Afrique de l’Est.

Avant d’arriver par milliers sur les côtes italiennes, ces hommes, femmes et enfants connaissent un déracinement total et c’est bien au péril de leur vie qu’ils échouent sur les territoires européens.

Le gouvernement italien rangé à l’extrême droite depuis l’élection de Giorgia Meloni en septembre 2022 déplore, une nouvelle fois, l’arrivée de milliers de personnes sur ses côtes. Ces positions trouvent un écho jusque sur les bancs du gouvernement français, puisque Marine Le Pen a annoncé ces derniers jours que Lampedusa connaissait une « submersion migratoire » . Des prises de position qui se font de plus en plus courantes en Europe, où les Etats membres peinent à trouver un terrain d’entente pour la problématique d’accueil de ces milliers de personnes en exil. 

Rappelons qu’en 2015, c’est 850 000 migrants – fuyant la Syrie pour la grande majorité d’entre eux – qui échouent en Grèce ; en 2022, on compte 156 mille demandes d’asile favorables en France et environ 244 mille en Allemagne. Le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations Unies annonce que l’Italie, depuis le 1er septembre, a accueilli sur ses terres plus de 167 000 réfugiés ukrainiens. 

Pierre Henry, président de France Fraternités, dénonce ainsi une « mise en scène » opérée par les autorités italiennes ; il évoque la prétendue « sur-occupation » du centre de 389 places, qui n’est que le résultat de l’écart notable entre le nombre d’arrivées et la taille de l’île. 

Il déplore  la direction politique du gouvernement italien  mais plus généralement une gestion de la crise migratoire par l’UE qui dépasse toute forme de raison : 

« En trois mois, l’an dernier, l’Europe a accueilli quatre millions d’Ukrainiens sans que personne ne crie à l’invasion migratoire. Là, on dit « submersion » pour quelques milliers de personnes, c’est absurde »   

L’instrumentalisation des chiffres au profit d’une politique anti migratoire prend forme en Italie, qui reste, avec la Grèce, la première destination visée par les personnes exilées en provenance du continent africain. 

Source : Courrier International du 19/09/2023