Le gitan des beaux quartiers : le noble qui vivait en caravane

Louis de Gouyon Matignon a le titre de noblesse qui va avec la particule. Et pourtant son combat c’est la défense des Tziganes. A 22 ans il est pote avec Marcel Campion, membre de l’Association de la Noblesse Bretonne et président d’un micro parti.

Alma-Marceau, à deux pas des studios d’Europe 1 – Louis de Gouyon Matignon – « Oui, comme l’avenue de Matignon à Paris » – s’avance d’un pas sûr. Ton poli, d’aucuns diront obséquieux, veste couleur caramel, tee-shirt blanc et regard franc, le jeune homme a la panoplie parfaite du rejeton de bonne famille. Et pourtant s’il était invité dans la matinale d’Europe 1, ce n’était pas pour se plaindre du matraquage fiscal, mais d’un autre lynchage, autrement plus dramatique. Celui de Darius, jeune Rom tabassé à Pierreffite-sur-Seine

« J’étais là pour porter les couleurs du drapeau Rom, si je puis dire. »

Louis a fondé l’Association de la défense de la culture tzigane. Et le garçon de bonne famille est devenu le porte voie médiatique des Roms et des Tziganes. Bon client, il écume les plateaux à chaque polémique. Et quand on le lance sur le sujet, il sort les crocs avec un discours que ne renierait pas Georges Marchais :

« Je montre du doigt les sociaux-traites, les solférinistes, qui n’ont fait que trahir l’intérêt français. Je m’indigne et j’appelle les Français à résister, à prendre conscience que les Roms font partie de notre territoire, c’est le devoir de la France des les accueillir et de les protéger ! C’est ça la France. »

FILS DE

Pas sur que son discours fasse l’unanimité dans les repas de famille. Car les De Gouyon Matignon ont le sang bleu : un ancêtre, maréchal d’Empire leur permet d’accrocher la particule. Et le grand père de l’étudiant en droit privé général est… marquis. Une ascendance que Louis, yeux bleus et chevelure à la Jamie Lannister assume : Il est en effet membre de l’Association de la Noblesse Bretonne (ANB). Et sa scolarité il l’a faite en pensionnat privé au Clifton College, à Bristol. Ça ne s’invente pas. A lire son CV tout droit sorti du who’s who, difficile de croire qu’à 23 ans, il est aussi l’auteur de trois livres et dictionnaires sur la langue et la culture tziganes. Mais quand on remet en question sa street cred, ça le met en rogne :

« Oui, j’ai un nom à particule et je suis issu de la vieille noblesse française. Ce qu’on me reproche c’est le sempiternel regain du blanc qui défend le noir. Toutes les personnes qui défendent d’autres minorités, on leur fait ce reproche. Mais si on ne les défend pas, il n’y a personne. »

GUEULE DE MÉTÈQUE

Louis a pris la route avec les tziganes :

« J’ai rencontré les gens du voyage, les manouches et les gitans grâce à la musique de Django Reinhardt. J’avais 16 ans. Et par la musique j’ai fait mon trou et je suis allé vivre avec les gens du voyage, en partant les week-ends et l’été sur les routes avec eux. La première fois que j’ai dormi dans une caravane, je me suis levé assez tôt, j’ai regardé autour de moi et je me suis senti à ma place. »

Après la musique, il apprit la langue, en 2 ans, grâce à un petit carnet dans lequel il notait toutes les expressions entendues et qu’il a transformé en dictionnaire de la langue tzigane. Désormais il se sent autant chez lui sous les dorures du 16ème que dans une caravane. Aujourd’hui son association n’est pas domiciliée dans les beaux quartiers où il habite, mais dans le bar de Saint-Ouen La Choppe des Puces tenu par « un ami » des débuts, le roi des forains, Marcel Campion.

POLITIQUE

Après son passage sur Europe 1, Louis s’engouffre dans le métro, direction l’Ouest parisien. « Je dois aller bosser mes cours dans le cabinet de mon père », explique-t-il. Le trajet est l’occasion d’en apprendre plus sur son autre passion, la politique : « Je veux une France qui bouge, qui gueule, avec des noirs, des arabes, des chinois, des juifs, des manouches, des gens différent et pour l’instant tu vois des noirs, des arabes, des femmes, des handicapés, des homosexuels au sein des assemblées ? »