Dirigé par Xavier Azalbert, FranceSoir (francesoir.fr) est un site participant depuis 2020 de la complosphère covido-sceptique francophone.
article publié sur le site conspiracywatch.info le 10 04 2021
Le Décodex du Monde souligne qu’« un nombre significatif de fausses informations et/ou d’articles trompeurs » sont présents sur le site de Xavier Azalbert tandis que le site de notation des médias NewsGuard considère que FranceSoir « enfreint gravement les principes journalistiques de base », notamment pour avoir « publié des allégations non fondées sur la pandémie de Covid-19 et d’autres sujets. » FranceSoir s’appuie notamment sur des sites complotistes comme GlobalResearch.ca.
Xavier Azalbert est le propriétaire du site depuis 2016, héritant ainsi de la marque du quotidien France-Soir fondé en 1944 par le journaliste Pierre Lazareff. Ce journal fut l’un des plus populaires de France dans les années 1950 avant de décliner lentement jusqu’à la disparition de son format papier en 2011. En 2015, le titre est devenu un site d’information en continu mêlant dépêches d’agences et contenus originaux. Jusqu’à l’été 2019, le site de France-Soir avait une rédaction de journalistes professionnels. Suite à un mouvement social initié en août 2019, ceux-ci ont été licenciés pour motifs économiques en octobre 2019.
En 2020, à la faveur de la crise sanitaire, le site prend un tournant éditorial ouvertement favorable à la mouvance complotiste la plus radicale. FranceSoir commence alors à ouvrir sa plateforme à plusieurs figures influentes de la complosphère covido-sceptique parmi lesquelles Silvano Trotta, Alexandra Henrion-Caude [archive], Jean-Bernard Fourtillan, Jean-Jacques Crèvecoeur [archive], Thierry Casasnovas [archive], Jean-Pierre Joseph, Dolores Cahill, Carlo Alberto Brusa, Martine Wonner, Gérard Guillaume, Louis Fouché, Reiner Fuellmich [archive], Pascal Sacré, Morad El Hattab, Jean-Marie Bigard, Anaïs Lefaucheux ou François Asselineau.
Le site interviewe aussi des personnalités gravitant en marge de la complosphère comme Juan Branco (avocat du Gilet jaune Maxime Nicolle) [archive], Idriss Aberkane, les professeurs Didier Raoult [archive], Christian Perronne, Henri Joyeux et Luc Montagnier ou des responsables politiques comme l’eurodéputée EELV Michèle Rivasi [archive], Jean-Frédéric Poisson ou le président du parti Les Patriotes Florian Philippot.
Dans les mois qui suivent, les chiffres de fréquentation de FranceSoir se redressent spectaculairement, passant de quelques centaines de milliers par mois à plusieurs millions.
Le 1er mai 2020, Xavier Azalbert publie un manifeste annonçant vouloir « proposer à [ses] lecteurs une nouvelle expérience à la fois informationnelle, servicielle et divertissante » et faisant « le pari partagé d’un journalisme moderne, collaboratif, et de qualité » reposant notamment sur la mobilisation de « journalistes [et d’]experts reconnus » mais aussi de « contributeurs anonymes, rédacteurs professionnels et bénévoles, occasionnels et réguliers ». Le patron de FranceSoir s’engage également à « à parler à tout le monde sans sectarisme, et à ne pas nous enfermer dans une vision du monde orientée et militante ou dans un florilège de prêt-à-penser clivant et dangereux pour nous comme pour vous. »
Le 9 juin 2020, le site ouvre ainsi ses colonnes au youtubeur complotiste Silvano Trotta.
Quelques jours plus tard, Les Décodeurs du Monde reviennent sur le « raccourci grossier et manipulateur » commis par FranceSoir en publiant un graphique du très controversé docteur Gérard Delépine faisant un lien entre confinement et mortalité.
En août 2020, le site de fact-checking de Libération, CheckNews, cible un article paru peu auparavant sur FranceSoir concernant des données sur le Covid-19 soi-disant inexactes qu’auraient publié l’Autorité régionale de Santé Pays de la Loire.
En octobre 2020, Xavier Azalbert lance avec plusieurs personnalités évoluant dans la complosphère francophone l’association Bon Sens.
Le 16 novembre 2020, dans un texte prenant fait et cause pour le film conspirationniste « Hold-up », les youtubeurs complotistes Silvano Trotta, Jean-Jacques Crèvecoeur et Alexis Cossette-Trudel sont présentés comme des « lanceurs d’alerte ».
A la mi-décembre 2020, le site s’adjoint les services de Richard Boutry, ancien journaliste de France Télévisions reconverti alors depuis plusieurs mois dans le commentaire à tendance complotiste de la gestion de la crise sanitaire.
Le 24 décembre 2020, un dénommé Frédéric Vidal publie sur FranceSoir une « Lettre ouverte aux journalistes de France et d’ailleurs » mettant en question la « réalité de cette fausse pandémie » (sic) et dénonçant « le mensonge que vous nourrissez avec grand zèle chaque jour et sur lequel repose la mise en place accélérée de la dictature du nouvel ordre mondial » ainsi que « la pédocriminalité sataniste institutionnalisée dans nos pays occidentaux ».
Le 21 janvier 2021, d’anciens membres de la rédaction initient une pétition adressée à la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, qui débute comme suit : « Nous, anciens journalistes de France-Soir, consœurs et confrères, amis et soutiens de ces journalistes, jugeons inadmissible que cette publication via Internet puisse répandre en toute impunité de fausses informations et des thèses complotistes dangereuses pour la société ».
Le 22 janvier 2021, FranceSoir publie une tribune de l’ancien chanteur Francis Lalanne accusant le gouvernement de « commettre insidieusement un coup d’État au nom de la COVID [et de s’apprêter] à instituer la tyrannie comme un avatar de la République ». Il « demande aux plus grands responsables militaires français […] de mettre fin à l’exercice du mandat de l’actuel président de la République » et de le « faire comparaître devant un tribunal [pour qu’il ait] à répondre du chef de haute trahison. » Des propos passibles de poursuites pénales pour provocation à la commission d’atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation et qui valent à Francis Lalanne et à Xavier Azalbert d’être convoqués quelques jours plus tard par la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP).
Le 26 janvier 2021, TMC diffuse un documentaire de Martin Weill, « Tous complotistes ? », dans lequel est interviewé Xavier Azalbert. Dès le début de l’interview, le partron de FranceSoir refuse de répondre à une question pourtant anodine, suscitant les moqueries sur les réseaux sociaux.
Le 29 janvier suivant, la ministre de la Culture Roselyne Bachelot annonce qu’elle a demandé à ce que soit réexaminé le certificat d’IPG (information politique et générale) délivré à FranceSoir afin de vérifier que ses conditions d’octroi sont bien toujours respectées.
En février 2021, FranceSoir lance une « pétition nationale pour l’accès à une information libre, complète, objective » dans laquelle le site se présente comme « un des rares médias indépendants qui joue un rôle de service public, en favorisant le pluralisme, l’esprit critique et la liberté d’expression ». Ce texte reçoit le soutien de Jean-Frédéric Poisson, président du parti Via (ex-Parti chrétien-démocrate, PCD, fondé par Christine Boutin) qui, sur Twitter, dénonce les « inclinations de plus en plus totalitaires » du Gouvernement.
Le 9 mars 2021, Jean-Marie Bigard prétend dans une interview à FranceSoir que le virus du Covid-19 a été fabriqué dans un laboratoire de Wuhan (Chine).
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Bon, Bigard dans le "Défi de la vérité" sur France Soir a fait son petit effet hier soir sur Youtube. La chaîne a sauté 30 minutes après la mise en ligne de la vidéo. Pourquoi donc ? Premier élément de réponse, ici BIBI parle du virus. pic.twitter.com/tSrjQ75pH8— Tiko Skep (@TikoSkep) March 10, 2021
Le même jour, la chaîne YouTube de FranceSoir est suspendue pour violation des conditions d’utilisation de la plateforme. FranceSoir reçoit alors le soutien des comptes complotistes « Fils de Pangolin » [archive], du film « Hold-up » [archive] et de François Asselineau [archive].
Le 13 mars 2021, FranceSoir se fait le relais [archive] d’une rumeur issue d’un site complotiste québecois et faisant état de l’acceptation par la Cour pénale internationale (CPI) d’une plainte déposée par des avocats israéliens contre leur gouvernement pour « violation du code de Nuremberg ».
Le même mois, FranceSoir publie un article établissant un parallèle entre la Rafle du Vel d’Hiv et le « Vel Nat’», à savoir le Vélodrome national de Montigny-le-Bretonneux qui accueille un centre de vaccination. « La rafle du Vel d’Hiv », écrit l’auteur (Marilis Valo) « nous révèle que la population française d’alors, dans sa majorité, était capable de consentir collectivement à un crime de masse se déroulant sous ses yeux. La peur, lorsqu’elle est bien orchestrée, peut emporter notre décision de croire ceux qui tentent de justifier l’injustifiable, et c’est ainsi que se construit l’Histoire : de soumission en soumission, de consentement en consentement, de justification en justification. Les victimes de la rafle ont été menées au Vel d’Hiv par la force. Les personnes qui feront la queue devant le Vel Nat’ pour y être vaccinées en masse, le feront de leur plein gré ».
Le 8 avril 2021, le Syndicat national des journalistes (SNJ) a annoncé que la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) avait renouvelé à FranceSoir sa qualité de Service de presse en ligne d’information politique et générale, s’indignant que des « fausses informations et des thèses complotistes » puissent continuer à être publiées sous ce titre.
FranceSoir a reçu 3,2 millions de visites par mois en moyenne au cours de l’année 2020 (données SimilarWeb), talonnant le site d’Alain Soral, Égalité & Réconciliation. Il cumule plus de 137 000 abonnés sur Facebook et 59 000 sur Twitter.