A la recherche du Mahomet de l’histoire

Cet épisode n’est pas sans poser problème, car il vient accréditer chez certains l’idée que l’islam serait par essence violent. Qu’en dites-vous ?

« L’idée de se faire sauter, comme le font les terroristes de Daech, est aux antipodes de la pensée des origines de l’islam »
A examiner la politique très pragmatique de Mahomet à Médine, on cherche en vain la violence sans frein prêtée à l’islam premier. On ne retient que quelques passages coraniques sans les contextualiser ni voir leur portée seulement conjoncturelle, et on ne dit rien des passages qui appellent à la retenue (Coran 2, 190). Cette société était régie par la loi du talion qui limitait efficacement les pulsions massacreuses. En outre, la hantise des groupes tribaux était de perdre des hommes. C’est pourquoi l’idée de se faire sauter ou de mourir volontairement au combat, comme le font les terroristes de Daech, est aux antipodes de la pensée des origines de l’islam.
Des passages extrêmement violents existent aussi dans l’Ancien Testament, comme en Nombres 31, avec le massacre des Madianites. Ce n’est pas pour autant que l’on décrète que le judaïsme est violent par essence. Mais il est tout aussi absurde de décréter que le Coran est pacifique. Tout comme la Bible, le Coran reflète les conflits de son temps.
Thomas Römer, professeur au Collège de France, souligne à propos du corpus biblique qu’il ne faut pas confondre un discours violent et ce qui se passe dans la réalité. Ce type de discours peut avoir une fonction compensatoire, les propos menaçants reflétant une impuissance à agir. Ce n’est pas le Coran qui impose des règles à la société de son temps. C’est la société qui impose des règles au Coran, lequel prend bien soin de ne jamais les transgresser. Sinon, il aurait été impossible à Mahomet de réussir en politique.